T.Boraud, A.Leblois, N.Rougier dans Prog Neurobiol
A natural history of skills. Boraud T, Leblois A, Rougier NP. Prog Neurobiol. 2018 Aug 29. pii: S0301-0082(18)30019-4. doi: 10.1016/ j.pneurobio.2018.08.003. [Epub ahead of print] Review. PMID: 30171867 / Bordeaux Neurocampus
CNRS, UMR 5293, IMN, 33000 Bordeaux, France
University of Bordeaux, UMR 5293, IMN, 33000 Bordeaux, France
CNRS, French-Israeli Neuroscience Lab, 33000 Bordeaux, France
CHU de Bordeaux, IMN Clinique, 33000 Bordeaux, France
INRIA Bordeaux Sud-Ouest, 33405 Talence, France
LaBRI, University of Bordeaux, IPB, CNRS, UMR 5800, 33405 Talence, France
En dépit de son obsolescence et de son invalidité, la théorie du cerveau triunique telle qu’introduite par Paul MacLean dans les années 1960 est encore dans très présente dans le discours scientifique et médiatique. Elle avait vite emporté l’adhésion à l’époque car elle s’appuie sur un vieux socle stoïcien pour lequel le propre de la nature humaine est de réprimer ses pulsions naturelles pour laisser parler sa raison et qu’elle trouve aussi écho dans les théories psychanalytiques encore en vogues au XXe siècle.
Cette théorie repose sur l’idée que le cerveau humain se serait développé en couches successives. D’abord le cerveau reptilien (maintien des fonctions vitales, réflexes), puis le cerveau limbique (émotions) et enfin le néocortex (raisonnement et anticipation), chaque couche supplémentaire venant inhiber au besoin les autres structures. Si la théorie du cerveau triunique est aujourd’hui largement réfutée, elle continue tout de même à influencer les sciences cognitives. Les théories explicatives proposées pour les processus de prise de décision, repose sur une compétition entre un structure raisonnée mais plus lente (généralement identifiée au cortex) et une structure automatique et peu flexible (fonction attribuée aux structures sous-corticales).
Dans un article récent intitulé « A Natural History of Skills » (sous presse, « Progress in Neurobiology »), Thomas Boraud (CNRS), Arthur Leblois (CNRS) et Nicolas Rougier (INRIA), trois chercheurs de l’IMN au Bordeaux Neurocampus, posent l’hypothèse que la prise de décision et son automatisation reposent sur un apprentissage cortical qui s’effectue sous la tutelle des structures sous-corticales. Ils montrent notamment que le développement des automatismes n’est pas un archaïsme mais au contraire un avantage évolutif lié au développement d’un pallium dorsal (la structure que nous appelons le cortex chez les mammifères) spécialisé qui a évolué en parallèle dans différentes lignées de vertébrés. En appuyant leur discours sur de très nombreux exemples tirés de la littérature et de leurs propres travaux, ils ont pu définir un modèle computationnel minimal grâce auquel cette hypothèse a pu être explicitement testée chez le primate. Cette approche permet entre autres de résoudre un certain nombre de paradoxe et propose de nouvelles pistes physiopathologiques pour les troubles de la décision.
In fine, ces trois chercheurs proposent donc de repenser le fonctionnement de la physiologie de la décision en considérant celle-ci non pas comme un conflit entre la raison corticale et l’émotion sous-corticale, mais au contraire comme une collaboration dynamique entre un système sous-cortical qui appuie ses décisions sur un système d’évaluation (dont chaque option est associée à une valence émotionnelle, positive ou négative) et un système cortical qui automatise et agrège les compétences dégagées au cours de l’apprentissage
Thomas Boraud, DR CNRS / IMN / Bordeaux Neurocampus
Dernière mise à jour le 06.09.2018
Mise à jour: 03/01/19