Mathieu Wolff, Fabien Alcaraz et al. dans eLife
Thalamocortical and corticothalamic pathways differentially contribute to goal-directed behaviors in the rat.
Fabien Alcaraz, Virginie Fresno, Alain R Marchand, Eric J Kremer, Etienne Coutureau, Mathieu Wolff Is a corresponding author. CNRS, INCIA, UMR 5287, France Université de Bordeaux, INCIA, UMR 5287, France Institut de Génétique Moléculaire de Montpellier, University of Montpellier, CNRS, France © 2018 eLife Sciences Publications / Research Article Feb 6, 2018
https://elifesciences.org/articles/32517
Résumé (Source CNRS)
Quand un mammifère prend une décision pour atteindre un but, il forme une représentation mentale de la valeur de la récompense escomptée mais également du lien causal entre son action et ce qui en résulte. Quand ces deux critères sont établis, on parle d’un « comportement dirigé vers un but ». Ces capacités de représentation peuvent être étudiées au laboratoire par des procédures issues de la psychologie expérimentale. Cette approche classique a permis d’établir le rôle prééminent du cortex préfrontal, structure la plus évoluée de notre cerveau. Des travaux récents ont néanmoins mis en lumière le rôle également important joué par les noyaux thalamiques qui sont des structures apparues plus précocement dans l’évolution et qui sont fortement interconnectées avec le cortex préfrontal.
L’équipe « Décision et Adaptation » s’est intéressée à la façon dont ces aires corticales et thalamiques communiquent. L’organisation anatomique de ces circuits « thalamocorticaux » se fait en boucles, qui sont définies par les projections réciproques caractérisant ces circuits. Cette organisation particulière pose la question de la nature de l’information qui est convoyée du cortex vers le thalamus et vice-et-versa.
Pour lever le voile sur cette question, les chercheurs ont mis en place avec leurs collaborateurs de l’équipe « Adénovirus : Récepteurs, Trafic Intracellulaire et Vectorologie » de Montpellier une stratégie d’intervention ciblée sur les projections thalamocorticales ou corticothalamiques au moyen d’une approche pharmacogénétique. Cette méthode consiste à faire exprimer aux neurones d’intérêt un récepteur modifié qui a pour caractéristique d’être activé exclusivement par l’application d’une drogue exogène, laquelle peut être injectée par voie systémique. Quand la drogue active le récepteur, tous les neurones qui en sont pourvus sont inhibés, de façon transitoire. En utilisant des vecteurs viraux aux propriétés complémentaires, les chercheurs sont parvenus à faire exprimer ces récepteurs modifiés uniquement aux neurones corticaux qui établissent des projections vers le thalamus, ou bien au contraire uniquement aux neurones thalamiques qui innervent le cortex préfrontal (Figure).
En couplant ces approches avec des épreuves comportementales adaptées, l’équipe a pu établir que les deux voies (thalamocorticales et corticothalamiques) sont nécessaires pour fonder un choix sur la valeur courante de la récompense, mais que seule la voie thalamocorticale est prépondérante pour fonder également ce choix sur le lien causal entre l’action et son effet. Ainsi, les deux attributs principaux d’un comportement dirigé vers un but sont assurés de façon différentielle par les voies thalamocorticales et corticothalamiques.
Ces résultats indiquent clairement que l’architecture en boucle des circuits thalamocorticaux est essentielle pour une prise de décision adaptée. De plus, ils permettent d’établir que la direction de propagation de l’information est une caractéristique fonctionnelle importante des circuits thalamocorticaux. Appliquer la même stratégie d’intervention sur d’autres circuits pour éprouver la généralité de ces données semble une perspective prometteuse, particulièrement pour ce qui concerne les désordres mentaux qui sont conceptualisés comme des troubles de connectivité entre aires cérébrales comme c’est le cas de la schizophrénie par exemple.
Mathieu Wolff CR, CNRS, Institut de Neurosciences Cognitives et Intégratives d’Aquitaine
Mise à jour: 19/06/18