Lieu : Centre Broca
Soutenance en français
Anna Petitbon
Equipe : FoodCircus (NutriNeuro)
Thèse dirigée par : TRIFILIEFF Pierre
Titre
Implication de la transmission dopaminergique mésocorticolimbique dans la flexibilité comportementale : rôle des hétéromères de récepteurs dopaminergiques et glutamatergiques NMDA
Résumé
Près d’une personne sur trois est affectée par une pathologie psychiatrique au cours de sa vie. Pour autant les traitements pharmacologiques classiques restent relativement peu efficaces et s’accompagnent souvent d’effets secondaires importants, du fait de leur manque de sélectivité. Un consensus émerge ainsi sur la nécessité d’identifier des mécanismes sous-jacents à des dimensions symptomatiques communes (approche transnosographique) afin de développer une médecine personnalisée en psychiatrie.
Dans ce contexte, des troubles des fonctions exécutives – processus cognitifs permettant à un individu de s’adapter à un environnement en constante évolution – sont un symptôme commun à de nombreuses pathologies psychiatriques. Ils sont corrélés à une altération de la transmission dopaminergique au sein du cortex préfrontal médian (mPFC) formant la voie mésocorticale et d’aires sous-corticales telles que le striatum ventral ou noyau accumbens (NAc) constituant la voie mésolimbique. Pourtant, les mécanismes par lesquels cette transmission dopaminergique dite mésocorticolimbique permet à un individu d’adapter son comportement de façon flexible restent à éclaircir. Par ailleurs, dans ces deux structures, l’activité des neurones dopaminoceptifs est fortement régulée par la convergence d’afférences glutamatergiques et dopaminergiques. Cependant, la façon dont les neurones intègrent ces signaux est encore peu caractérisée.
Mon projet de thèse préclinique vise ainsi à comprendre comment la transmission dopaminergique mésocorticolimbique module la flexibilité comportementale, et plus particulièrement l’interaction physique – ou hétéromérisation – entre les récepteurs dopaminergiques de type D1 (D1R) ou D2 (D2R) et les récepteurs glutamatergiques de type N-méthyl-d-aspartate (NMDA) au sein du mPFC et du NAc. Nos résultats montrent qu’inhiber la transmission dopaminergique mésocorticolimbique par manipulation chémogénétique, ou bloquer la capacité de récepteurs dopaminergiques et NMDA à former des hétéromères dans le NAc ou le mPFC par utilisation de peptides interférents, perturbe spécifiquement la capacité des animaux à réactualiser les associations entre appui levier et récompense, dans des tâches permettant d’évaluer la flexibilité comportementale. Ces résultats suggèrent que la transmission dopaminergique mésocorticolimbique est sélectivement impliquée dans la mise à jour d’associations entre une action et ses conséquences et que de tels effets sont largement médiés par les hétéromères de récepteurs D1/NMDA et D2/NMDA du mPFC et du NAc. Ces hétéromères ayant des effets distincts des récepteurs individuels, ces données suggèrent qu’ils pourraient être des cibles de choix pour le développement de traitements thérapeutiques plus spécifiques : leur manipulation pourrait permettre de s’affranchir des effets secondaires liés aux traitements pharmacologiques classiques qui ciblent directement ces récepteurs. En utilisant une approche de senseurs calciques couplée à de la photométrie de fibre, nous avons caractérisé i) la signature neuronale des neurones dopaminoceptifs exprimant D1R ou D2R du mPFC lors d’un conditionnement pavlovien puis opérant et notamment au cours de la réactualisation des associations et ii) l’effet du blocage des hétéromères sur ces activités. Nous avons pu mettre en évidence une réponse calcique au moment de l’appui sur le levier renforcé et des indices prédicteurs de la récompense, ainsi qu’une diminution d’activité lors de la consommation de la récompense. Nous montrons que le blocage des hétéromères D1/NMDA et D2/NMDA module certaines de ces composantes d’activité. Ce mécanisme nous permet ainsi de mieux comprendre la mise en place de processus d’adaptation comportementale et constitue donc une cible thérapeutique innovante. Il pourrait permettre d’envisager des traitements personnalisés visant à cibler les troubles de fonctions exécutives et plus particulièrement les altérations de la flexibilité comportementale.
Mots clés: Flexibilité comportementale – Dopamine – Glutamate – Hétéromères de récepteurs – mPFC – NAc
Jury
Dr TRIFILIEFF Pierre, Directeur de recherche, INRAE, Bordeaux Directeur de thèse
Dr FAURE Philippe, Directeur de recherche, CNRS, Paris Rapporteur
Dr BURGUIERE Éric, Chargé de recherche, CNRS, Paris Rapporteur
Dr PARKES Shauna, Chargée de recherche, CNRS, Bordeaux Examinatrice
Dr FINO Élodie, Chargée de recherche, CNRS, Marseille Examinatrice
Dr GROC Laurent, Directeur de recherche, CNRS, Bordeaux Examinateur
Dr VANHOUTTE Peter, Directeur de recherche, CNRS, Paris Invité