ML Arotcarena et al dans Brain
Propagation bidirectionnelle de la synucléinopathie chez les primates non humains : nouvelles perspectives sur l’axe intestin-cerveau dans la maladie de Parkinson
Plusieurs études ont récemment montré que la maladie de Parkinson (MP) pourrait trouver son origine dans l’intestin. En effet, des agrégats de la protéine alpha-synucléine, jouant un rôle clé dans le développement de la maladie, sont présents dans l’intestin. Une étude récente menée par une équipe franco-espagnole, chez des primates non-humains, montre que, non seulement l’alpha-synucléine peut être transportée de l’intestin vers le cerveau, mais aussi du cerveau à l’intestin. Cette étude, publiée dans le dernier numéro de la revue Brain, ouvre de nouvelles perspectives sur notre compréhension du rôle de l’axe intestin/cerveau dans l’initiation et la propagation de la pathologie de la MP.
La maladie de Parkinson est caractérisée, d’une part par la mort cellulaire d’une population neuronale spécifique, et d’autre part, par l’accumulation de la protéine alpha-synucléine dans ces cellules. L’idée que l’axe intestin-cerveau pourrait jouer un rôle dans l’initiation de la maladie a vu le jour en 2003. Une équipe de neuro-anatomistes dirigée par Heiko Braak a découvert la présence d’inclusions d’alpha-synucléine dans le système nerveux entérique (i.e. intestin) de personnes décédées de la MP. Cette découverte a permis de développer l’hypothèse selon laquelle la pathologie liée à l’accumulation d’alpha-synucléine se propagerait de l’intestin au cerveau. Cependant, l’origine intestinale de la MP n’a pas été prouvée chez les primates non humains et la possibilité que l’alpha-synucléine soit également transportée du cerveau a l’intestin est toujours à l’étude.
« Des données récentes de notre laboratoire montrent que l’injection dans le cerveau d’agrégats d’alpha-synucléine provenant de cerveaux parkinsoniens, peuvent initier et propager le processus neurodégénératif qui caractérise la maladie de Parkinson, chez la souris et le primate « , a expliqué l’un des principaux auteurs, Dr. Benjamin Dehay, de l’Institut des Maladies Neurodégénératives, Université de Bordeaux, France. « En utilisant l’injection de ces mêmes agrégats humains, notre étude montre que non seulement l’alpha-synucléine se propage de l’intestin vers le cerveau, mais se déplace également du cerveau vers l’intestin. Comprendre comment la maladie se développe au fil du temps devrait ouvrir la porte au développement de nouvelles approches thérapeutiques. »
L’étude montre que l’injection d’agrégats d’alpha-synucléine provenant de cerveaux parkinsoniens, induit :
1- une neurodégénérescence, deux ans après l’injection, indépendant du site d’injection, cerveau ou bien intestin ;
2- des dépôts de la forme pathologique de la protéine alpha-synucléine, à la fois dans le système entérique et dans le cerveau. Le Dr. Dehay ajoute qu’ “il existe une corrélation entre le niveau élevé d’alpha-synucléine dans les neurones entériques et la neurodegeneration progressive de la voie nigrostriatale »;
3- une accumulation d’une forme pathologique de l’alpha-synucléine, à la fois dans le cerveau et dans le système entérique, suite à une injection intracérébrale. Ces résultats indiquent que la propagation de l’alpha-synucléine peut avoir lieu également entre le cerveau et l’intestin chez le primate non humain.
Bien que d’autres expériences soient nécessaires, l’étude suggère également que la transmission de la pathologie de la α-synucléine ne passerait pas par le nerf vague comme cela avait été suggéré précédemment. Au lieu de cela, « nos résultats suggèrent un mécanisme systémique possible, dans lequel la circulation générale agirait comme une voie de transmission bidirectionnelle à longue distance de la α-synucléine endogène », a expliqué le Dr Dehay, renforçant le rôle prédictif de l’alpha-synucléine en tant que biomarqueur.
Référence de l’article
† MLA, SD, AP, MB are co-first authors
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Mise à jour: 19/05/20